mardi 24 février 2009

Et qui c'est qui se sucre ?

Je suis parti dans ma cuisine à la recherche d'un premier exemple de communication mensongère. Et j'ai trouvé le "C'est la vie". Vous ne connaissez pas ce produit ? Allez voir dans votre cuisine, je suis sûr que vous en avez :
avant, ça s'appelait "sucre" !

Voilà ce que nous dit ce paquet de sucre, distribué à des millions d'exemplaires :
"C'est la vie", "Toute la vitalité de la nature", "Au p'tit déj, quand c'est jus de fruit, je saupoudre : quelle énergie ! A midi, si c'est laitage, je saupoudre : le plaisir a du goût ! Plus tard, il y a une fête, je saupoudre : Oui ! c'est vraiment la fête !", "A chaque moment de vie, le sucre est l'énergie du quotidien".

Difficile de démêler le vrai du faux dans tout ça, non ? Car il y a du vrai !

- Vrai que le sucre est un excitant : "quelle énergie !", "c'est vraiment la fête"... (en tant qu'animateur ou directeur de "colo", j'ai compris qu'il valait mieux arrêter la distribution de bonbons et boissons sucrées une heure avant d'annoncer la fin de la boum...)

- Vrai que le sucre peut créer de la dépendance ("au p'tit déj, je saupoudre".."plus tard, je saupoudre"...). Le "C'est la vie" donne une consigne de consommation : "à chaque moment de vie, le sucre..." - ce qui ne laisse pas beaucoup de temps pour faire autre chose.

La surconsommation de sucre semble être un autre enjeu que la publicité mensongère. Mais ce premier sujet nous donne déjà deux pistes de réflexion :
1. La communication mensongère peut utiliser comme technique de ne présenter que le bon côté des choses ("le sucre donne de l'énergie"). Le mensonge par omission est-il inclus dans la loi ? Y-a-t'il eu des condamnations sur ce motif ? Quelles limites se fixent les entreprises et les agences de publicité ? J'en appelle aux juristes spécialisés, travaillant pour des marques ou agences : venez témoigner librement !


2. Les cas de communication mensongère n'apparaissent-ils pas lorsque, justement, il y a quelque chose à cacher ? Je pense déjà à un prochain sujet : les représentations de la nature dans les produits industriels agro-alimentaires.

Continuons l'analyse de cette communication - mensongère ?
"Toute la vitalité de la nature". cette phrase est simple, et ne veut pas dire autre chose que : "dans ce kilo de sucre il y a toute la vitalité de la nature": toute ? TOUTE ?? Dans un kilo de sucre ? C'est impossible. J'en appelle cette fois aux biologistes : la nature peut-elle être entièrement incluse dans un kilogramme de sucre ? Ou bien, cela est-il un flagrant délit de mensonge ?
Plus vrai serait de dire : "Une infime partie de la vitalité de la nature". Certes, le sucre est un extrait concentré de la nature (il faut 10 à 15kg de betterave pour faire un kilo de sucre), un peu comme la cocaïne par exemple, extraite de la feuille de coca, feuille très bonne pour la santé... Devrait-on manger plus de betterave et moins de poudre ? Le lobby du sucre, paraît-il très puissant, va-t-il m'engager pour revoir sa communication (c'est aussi mon métier !), ou bien m'assassiner ? Je suppose qu'ils étudieront la solution la moins coûteuse..

Concluons avec les illustrations de ce paquet : on y voit des enfants très souriants et très actifs, reprenant donc l'idée principale : le sucre excite et rend heureux. Soit. Mais... Un personnage joue avec un "saupoudreur" géant, un autre est déguisé en cow-boy sur une banane volante... Le sucre aurait-il aussi des effets hallucinatoires ?

Au-delà de la "plaisantriste", nous reviendrons, à l'aide d'autres exemples, sur la notion de mensonge par l'image (le "mensonge pictural"...), et particulièrement l'illustration. Quelle valeur informative a-t-elle ? Sur quels critères distinguer, dans une même image, le décoratif et l'informatif ? Attention : il faudra peut-être en passer par un peu de théorie sémiotique !

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